L’ère du numérique rend-il le papier obsolète ? Pour Bouvard et Pécuchet, aucun doute. Pour Homer Simpson, peut-être – exception faite du Springfield Times, qu’il préfère feuilleter tous les matins entre deux pauses à la centrale. Mais pour les observateurs sérieux, nullement. Dans le champ de la communication corporate comme sur le marché du livre, le contenu papier demeure une valeur d’avenir. Faisons rapidement le point.
Franchement, aimez-vous caresser votre écran plat ?
Pas moi. Mon PC n’est pas mon genre. Alors qu’avec son parfum, son grain, son toucher, sa main (un si beau mot pour désigner des feuilles de papier en leur conférant comme une existence corporelle !), sa matérialité qui fait appel à tous les sens, avouez que le papier a quelque chose d’incomparablement charnel. Et cela suffirait à lui garantir un créneau auprès des hommes (et des femmes) de goût.
Mais allons plus loin. Certes, l’essor des technologies informatiques et des processus dits « dématérialisés » (ça, ce n’est pas un joli mot) ont bouleversé le rapport à l’écrit et à son support le plus traditionnel. Les octets et les bits ne se sont pas substitués aux fibres de papier malgré les formidables horizons ouverts par les liseuses électroniques et en dépit aussi des atouts indéniables de l’édition on-line (vitesse de diffusion et de mise à jour, variété des contenus, coûts de production moins élevés, etc.). Pourquoi croyez-vous donc que les entreprises continuent de débiter à la chaîne plaquettes, brochures et autres dépliants ? C’est bien qu’elles croient encore au papier … et qu’elles s’emploient par son truchement à caresser le client dans le sens du poil.
Les grandes entreprises jouent à fond sur la complémentarité entre publications papier et édition en ligne. Certaines d’entre elles – exemple : GDF SUEZ – ont mis en place des pratiques d’éco-édition très poussées, en veillant à une bonne gestion du matériau (bois issu de forêts certifiées, recyclage, etc.), à la réduction de l’impact environnemental des techniques d’impression, à l’utilisation de formats plus économes en matières premières, ou encore aux conditions de transport et de stockage des documents.
Et cela leur permet d’avoir, c’est le cas de le dire, de « bons papiers » dans la presse, car elles savent communiquer astucieusement sur leurs initiatives dans ce domaine.
Autre point : rappelons que l’édition numérique n’est pas sans effet sur l’environnement. Les serveurs utilisent beaucoup d’énergie. La fabrication des équipements nécessite des ressources rares (lithium, coltan, terres rares …). Le matériel informatique en fin de vie doit être recyclé. Et puis n’oubliez pas que l’internaute – vous, moi, tout le monde – imprime souvent les documents dénichés sur le web.
Terminons ce bref propos par une belle citation empruntée au dernier livre d’Erik Orsenna, Sur la route du papier. « La planète et le papier vivent ensemble depuis si longtemps : plus de deux mille ans. Le papier est de la planète sans doute le miroir le plus fidèle et par suite le moins complaisant ».
Le papier demeure une valeur sûre. Ce n’est pas l’ennemi du visible content. Et quoi qu’on en dise, il demeurera l’ami de la planète et des terriens.
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Victor de Staël est journaliste indépendant. Il collabore à différentes revues littéraires et artistiques et collabore avec des agences de conseil en communication orientées « content marketing ». Ancien élève de Eton College et diplômé en art et en gestion de l’Université de Columbia, il prépare actuellement un Dictionnaire du story-telling.
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